La vie nous apprend qu’il n’y a pas pire douleur pour un parent que d’enterrer son enfant. Que dire quand un parent doit enterrer à la fois ses deux enfants ? Cette douleur est celle de la famille Kéita qui, le vendredi dernier, a appris de façon tragique le décès de ses enfants Mohamed Djaguine et son petit frère Abdine heurtés sur leur moto par l’avion TAP Air lors de son atterrissage sur la piste de l’aéroport international Ahmed Sékou Touré.
Revenant sur la manière dont elle appris le décès de ses enfants, Djeneba Camara mère d’Abdine et Mohamed Djaguine dit avoir éprouvé une forte sensation de mal-être ce jour. Elle que ses enfants avaient pour habitude d’appeler tous les matins n’a malheureusement reçu aucun d’eux ce fameux vendredi.
Sans se douter du choc qui l’attendait, elle a vaqué à ses occupations habituelles mais avec toujours cette même sensation de mal-être
« Ma fille qui vit à Dapompa devait venir me voir mais elle m’a dit « maman j’allais te voir mais le patron de mon mari qui devait voyager aujourd’hui n’a pas pu y aller parce qu’il y a eu un accident à l’aéroport et deux jeunes y sont morts donc il n’a pas pu voyager ». J’ai dit « Mais comment sont-ils morts ? Sur la piste? Ne savent-ils pas qu’on ne circule pas sur la piste? ». Mais je ne savais même pas que c’était mes enfants. Vu qu’ils ont pour habitude de m’appeler tous les matins à l’aube, j’ai remarqué que ce jour aucun des deux ne m’a appelée. Alors j’ai décidé de les appeler mais leurs numéros ne passaient pas. J’ai pensé que c’était un problème de réseau ou que leurs téléphones étaient déchargés. Ensuite je me suis couchée mais je ne me sentais pas bien et je n’arrivais pas à dormir alors je suis allée faire des achats à Matoto, puisque je vends du riz », explique-t-elle.
Ne se doutant toujours pas du danger qui planait à l’hôpital, il aura fallu un appel d’un ami d’Abdine pour raviver de plus belle l’inquiétude de Djeneba Camara au sujet de ses deux garçons.
« Un des amis de Abdine m’a appelé pour me demander de ses nouvelles car il était inquiet vu qu’il a une moto. J’ai dit tu m’inquiètes. Il m’a dit non ne t’inquiète pas, il est peut-être chez un ami. Mais j’étais de plus en plus inquiète et mon corps tremblait. Alors je me suis empressée de rentrer à la maison en prenant une moto. Quand je suis rentrée j’ai encore tenté de les joindre mais ça ne passait toujours pas. Alors j’ai envoyé mon dernier garçon sur leurs lieux de travail pour savoir si tous les deux allaient bien. J’étais rentrée me laver quand mon dernier fils m’a appelé pour me dire qu’il est allé trouver les gens en larmes là-bas mais que personne n’a rien voulu lui dire. J’ai aussitôt jeté le téléphone et je suis sortie de la douche avec l’éponge et le savon en main.. J’ai appelé des voisins pour m’accompagner car j’avais entendu parler de l’accident de l’aéroport. Mais en y allant, on nous dit que mes enfants sont à la maison. J’ai dit comment peut-on être à la maison après un accident ? Alors c’est qu’il est mort. J’ai dit cela sans penser que c’était les deux. Car c’est Abdine qui travaille à l’aéroport. Et Mohamed lui il travaille à Madina. Il paraît que c’est Abdine qui a appelé son grand frère pour qu’il vienne chercher la moto et l’envoyer je ne sais où. C’est ainsi que ce dernier est venu chercher la moto et tous les deux ont trouvé la mort dessus. Moi je pensais que c’était seulement Abdine mais ce n’est qu’avec les visiteurs que j’ai appris que c’est les deux. J’ai dit alors je m’en remets à Dieu. Mes enfants qui prennent soin de moi et qui ne veulent même pas que je fasse le commerce. Je m’en remets à Dieu. Mohamed a trois enfants et Abdine en a deux. Tous deux ont des enfants jumeaux. Tous les deux me disaient » Maman on ne veut plus que tu fasses quoique ce soit car tu n’es plus toute jeune. J’ai dit mais laissez moi vous aider car vous ne pouvez pas tout faire. Laissez moi vous aider car pour le moment je peux encore, je ne suis pas encore fatiguée… Aujourd’hui, ils sont tous sont morts », sanglote-t-elle.
À l’en croire, ils auraient reçu une visite des responsables de l’aéroport qui leur ont offert une enveloppe de 10 millions. Une forte somme qui selon elle ne pourra jamais compenser sa douleur d’avoir perdu ses enfants.
« Ses chefs sont venus nous saluer et nous ont donné une somme de 10 millions. C’est vrai que les 10 millions sont beaucoup mais ce n’est pas beaucoup pour moi. Ce que mes enfants représentaient pour moi, c’est plus que les 10 millions. Je n’accuse personne mais je m’en remets à Dieu et je m’en remets à vous aussi. C’est eux qui s’occupaient de nous. Leur père est devenu vieux et moi aussi je me fais vieille. Je ne peux pas me battre comme eux ils le faisaient pour nous. Je ne demande pas de rembourser le prix de leurs âmes mais de nous venir en aide. Ils ne sont plus et maintenant nous avons la responsabilité de leurs petits enfants », a-t-elle sollicité.
Maciré Camara
L’article Mort tragique de Abdine et Djaguine après avoir été heurtés par TAP Air Portugal : « on a reçu 10 millions, mais… » (mère) est apparu en premier sur Mediaguinee.org.
Last modified: 8 septembre 2022